Les crêpes expliquées aux Japonaises
Cela
faisait quelques temps que j'avais promis à mes élèves du séminaire de
Français de confectionner des crêpes. C'est désormais chose faite !
Il m'a tout d'abord fallu confectionner la veille une énorme quantité de pâte à crêpes,
en quadruplant les proportions de la recette de base (12 oeufs d'un
coup, ça m'a fait bizarre, moi qui les utilise avec parcimonie !).
Puis,
avant de commencer la cuisson, j'ai expliqué à mes japonaises le
concept de crêpe... à la française. En effet, les Japonais connaissent
les crêpes, mais selon un concept différent. Pour vous donner une idée,
une crêperie japonaise ressemble à ça :
Des crêpes en
plastique alignées dans une vitrine qui permettent de faire son choix
de visu. Comme vous pourrez le remarquer, la forme est celle d'un
cornet ouvert, et d'ailleurs les crêpes contiennent en général de la crème
glacée. Et plein d'autres choses : Chantilly, fruits, parts de gâteau,
confiture, crème custard, et j'en passe... En fait, les Japonais
n'envisagent pas le concept de crêpe sans celui de complexité. Une
crêpe toute simple (la meilleure : blé noir beurre !) n'entre pas dans
leur registre, pas plus qu'une crêpe salée (ou rarement). Ici, la crêpe est un
dessert, énorme et transgressif !
Quand j'ai expliqué à mes
Japonaises que les Français aimaient aussi saupoudrer leur crêpe de
sucre cristallisé, la rouler et la dévorer sans manières, elles ont
ouvert de grands yeux et pousse un cri interrogatif : "eeeeeeeeeeeeeh
???". Eh oui, les Français ont vraiment des moeurs bizarres ! J'ai
aussi fait les présentations avec la crème de marrons (j'ai eu la
chance de trouver un pot de crème Bonne Maman), qui a remporté un franc
succès. Je voulais également introduire notre ami le Nutella, qu'elles
ne connaissent pas, mais là, par contre, je n'en ai pas trouvé. Nous
disposions donc, pour garnir nos crêpes, de beurre, de sucre, de crème
de marrons, de confiture de fraises, de miel, de bananes et de
Chantilly. J'aurais bien testé les crêpes salées aussi, mais le budget
de ces demoiselles nous a forcées à limiter le nombre des garnitures.
Nous
sommes donc passées à la cuisson d'une bonne soixantaine de crêpes,
chacune devant preparer les crêpes qu'elle allait manger. Nous nous
retrouvâmes souvent avec de la bouillie de crêpes, de la crêpe pas
cuite, de la crêpe charbon, mais aussi avec de jolies crêpes tout à
fait dignes de nos crêperies françaises. Vint ensuite le moment tant
attendu : la garniture et la dégustation. Là, c'est à croire que leur
instinct de Japonaises a pris le dessus : je n'ai pu recenser aucune
crêpe à moins de trois garnitures, la plus écoeurante à mon goût étant
quand même la confiture-miel-crème de marrons, qui a pourtant remporté
un franc succès. Comme quoi, les goûts et les couleurs ne se discutent pas !
Vive le relativisme culturel !